REQUISITIONS DU PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR SUPREME A L’AUDIENCE SOLENNELLE DE RENTREE DE LA HAUTE COUR DU 22 FEVRIER 2021

6 octobre 2024

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AUDIENCE SOLENNELLE DE RENTREE DE LA COUR SUPREME
25 FEVRIER 2021
REQUISITIONS DE MONSIEUR LE PROCUREUR GENERAL PRES
LA COUR SUPREME
Monsieur le Premier Président de la Cour Suprême,
Je vous remercie de l'honneur qui m'est fait de prendre la parole pour les
réquisitions du Ministère Public, à l'occasion de cette audience solennelle de
rentrée de la Cour Suprême au titre de l'année 2021.
Monsieur le Président du Sénat,
Monsieur le Président de l'Assemblée Nationale,
Monsieur le Président du Conseil Economique et Social,
Le Parquet Général près la Cour Suprême vous souhaite la bienvenue dans
cette enceinte.
Il vous sait gré d'avoir bien voulu abandonner pour quelque temps vos
importantes et absorbantes occupations pour honorer cette rencontre de votre
présence.
Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement,
La Cour Suprême s'honore de vous accueillir.
Elle vous est reconnaissante d'avoir bien voulu accepter d'assister à cette
audience solennelle de rentrée.
Monsieur le Président du Conseil Constitutionnel,

Vous êtes un habitué de ces lieux; soyez remercié d'avoir bien voulu accepter
d'honorer notre invitation.
Monsieur le Ministre d'Etat, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux,
Les hôtes de ces lieux vous accueillent avec déférence.
Ils vous renouvellent leur reconnaissance pour l'honneur qui leur est ainsi fait.
Messieurs les Ministres, Ministres Délégués et Secrétaires d'Etat,
Mesdames et Messieurs les Chefs des Cours d'Appel et du Tribunal Criminel
Spécial,
Mesdames et Messieurs les Présidents des Tribunaux Administratifs
Régionaux,
Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats au Barreau du Cameroun,
Madame le Président de la Chambre Nationale des Notaires,
Monsieur le Président de la Chambre Nationale des Huissiers,
Mesdames et Messieurs,
Honorables invités,
Le Parquet Général près la Cour Suprême vous remercie d'avoir accepté de
répondre à l'invitation qui vous a été adressée.
Cette audience solennelle a comme fondement l'article 33 de la loi n° 2006/016
du 29 Décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement de la Coùr
Suprême, modifiée et complétée par la loi n° 2017/014 du 12 Juillet 2017.
En cette occasion unique, vous voudrez bien me permettre d'aborder avec vous
une réflexion sur l'impact de l'incivisme dans le développement des infractions
émergentes.
Ces dernières années, l'incivisme, entendu comme le non-respect de la règle ou
de la norme dans les services publics de l'Etat, dans la circulation routière, dat;ls

l'utilisation des biens publics, dans la vie quotidienne et en milieu scolaire, n'a
cessé de prendre de l'ampleur.
Il devient par conséquent un sujet d'une brûlante et inquiétante actualité.
Beaucoup de Camerounais se comportent comme s'ils avaient oublié leur sens
civique et moral, au point où cracher en pleine rue, jeter les déchets par la
fenêtre de sa voiture, encombrer la chaussée, détruire les garde-fous des
chaussées, y abandonner des épaves de voiture, violer un feu rouge, casser ou
boucher les canalisations d'eau, omettre de payer la facture d'eau et
d'électricité, se soustraire à l'obligation de payer ses impôts, ou de prendre en
charge la scolarité de ses enfants, émettre gratuitement des grossièretés, et
d'autres méfaits encore sont devenus courants.
Il ne s' agit pourtant pas de comportements normaux ni ordinaires.
Au contraire, ces méfaits traduisent un manque de dévouement à l'égard de la
Nation. Ils ont des répercussions négatives sur le fonctionnement des
institutions, sur la cohésion sociale et le vivre ensemble, et sont d'autant plus à
proscrire qu'ils constituent pour la plupart, des infractions à la loi pénale.
Ces comportements suscitent davantage d'inquiétude lorsque certains citoyens
croient associer la revendication d'un état de choses à la négation de la
démocratie\ contribuant par leur attitude, à faire accroitre la manifestation
d'une désobéissance civile d'un genre particulier.
La désobéissance civile2 se définit cependant comme le refus assumé et public
de se soumettre à une loi, un règlement, une organisation ou un pouvoir ju~é
inique par ceux qui le contestent, tout en faisant de ce refus une arme de
combat pacifique.
Dans l' histoire, elle a été l'arme favorite du Mahatma GANDHI3 et du Pasteur
Martin Luther KING.4
1 MO MO Jean de Dieu: de la revendication à la négation de la démocratie (notre cours de science politique) ~
Cameroun. Sur internet.
2 Définition sur internet.
3 MOHANDAS KARAMCHAND GANDHI, né à PORBANDAR le 02 Octobre 1869 et mort assassiné à DELHI le 30
Janvier 1948, est un dirigeant politique, important guide spirituel de l'Inde et du mouvement pour
l'indépendance de ce pays.

Pour un certain auteurS
« La désobéissance civile implique la défense d'un intérêt qui dépasse l'intérêt
individuel de celui qui la pratique. Elle tire sa légitimité du fait qu'elle affirme
défendre l'intérêt général contre des pratiques, une politique, des lois qui la
contrediraient. )}
Fin de citation.
Il s'agit donc d'une forme de résistance passive qui consiste à refuser d'obéir à
une loi ou un jugement d'ordre civil. Elle aurait pour objectif d'attirer
l'attention de l'opinion publique sur ce que les partisans considèrent comme
étant le caractère inique ou injuste d'une loi, avec l'espoir d'obtenir
l'abrogation de celle-ci ou son amendement.
Ceux qui font recours à la désobéissance civile savent qu'ils violent la règle. Ils
assument la marginalité dans laquelle ils s'engagent. Ils sont par conséquent
prêts à encourir les peines, dont l'emprisonnement, qui pourraient leur être
infligées pour avoir enfreint la loi.
Les caractéristiques généralement admises de la désobéissance civile sont les
suivantes:
Les manifestants commettent une infraction de façon consciente et
intentionnelle;
L'infraction commise est un acte public supposé avoir une valeur
symbolique, et dont le but consisterait à sensibiliser la majorité de .Ia
population, considérée comme inconsciente ou endormie;
Il s'agit d'une action concertée, menée par plusieurs personnes en même
temps, un mouvement collectif;
Les contestataires utilisent ou font recours à des moyens pacifiques;
Pour arriver à leurs fins, ils acceptent le risque de subir les sanctions
prévues par la loi;
4 Martin Luther KING Junior, né à ATLANTA en GEORGIE (USA) le 15 Janvier 1929 et mort assassiné le 04 Avri l
1968 à MEMPHIS, dans le TENNESSEE, est un pasteur baptiste et militant non-violent afro américain pour le
mouvement des droits civiques des noirs américains aux Etats-Unis, fervent militant pour la paix et contre la
pauvreté.
S Xavier RENOU, pacifiste, écologiste, altermondialiste et anti-capitaliste français, in Petit Manuel de
Désobéissance Civile, Editeur: SYLLEPSE, 22/10/2009, 141 pages. Sur internet. Les développements suivants
sur les caractéristiques de la désobéissance civile sont aussi tirés d'internet.

Mais, en tout état de cause, l'activité des contestataires fait appel à des
principes éthiques supérieurs.
Cette activité suppose par conséquent, l'exclusion de toute idée d'insurrection,
d'atteinte aux biens publics et aux droits individuels des personnes, de violation
des règles éthiques et morales, de tricherie, de fraude, de calomnie, de
délation, de profit personnel. Elle n'empêche pas l'application de toutes les
autres dispositions législatives et règlementaires auxquelles les contestataires
restent tenus de se conformer rigoureusement.
En tout état de cause, l'attitude générale des manifestants sublime l'intérêt
supérieur de l'Etat et de la communauté des citoyens, et s'impose l'objectif de
protéger les intérêts particuliers de chaque membre de la collectivité.
Cette protection n'est cependant pas envisageable dans un climat d'incivisme
caractérisé.
S'ajoutant à l'insécurité qui est entretenue dans certaines parties du territoire
national, les attitudes et comportements débridés subséquents attisent
davantage les tensions sociales et les divisions, et entraînent une prolifération
incontrôlable des atteintes à l'ordre public.
Dénonçant avec la dernière énergie la recrudescence des nouvelles menaces" à
la paix et à la sécurité des personnes, dans son discours à la Nation le 31
Décembre 2020, le Président de la République, son Excellence Paul BIYA fait le
constat suivant:
Et je le cite:
« Depuis quelques années, notre pays fait face à des menaces venant de
l'extérieur, notamment à notre frontière orientale et dans la partie
septentrionale de notre territoire.
Dans le premier cas, il s'agit de bandits de grands chemins attirés par des proies
faciles que constituent de paisibles éleveu rs et leurs troupeaux.
Dans le second, ce sont désormais des raids isolés de BOKO HARAM ou des
tentatives d'attentats suicides confiés à des adolescents. La vigilance et l'action

efficaces de nos forces de défense et de sécurité · ont fait diminuer
sensiblement les actes de ces criminels.
La situation est différente dans nos Régions du Nord-Oue~t et du Sud-Ouest où
des groupes armés entretiennent un climat de terreur èt d'insécurité. C'est
ainsi que, périodiquement, ils attaquent des communautés isolées et
également des établissements d'enseignement pour dissuader les parents d'y
envoyer leurs enfants. La liste est déjà longue des exactions et des crimes qu'ils
ont commis. »
Fin de citation .
Exhortant la jeunesse à se garder de tomber dans ces errements, le Chef de
l'Etat, dans un autre discours prononcé le 10 Février 20216
, déclare:
« S'agissant de l'unité nationale, certains d'entre vous ont fait le choix
malheureux de faire alliance avec les démons de la haine et de la division. Mus
par un fanatisme barbare, souvent conçu et alimenté depuis des pays étrangers
ou par un usage pervers des réseaux sociaux, ils tentent de saborder les bases
de la Nation.
Ceux-là sont des « anti-modèles ». Je vous exhorte à vous en éloigner. Ils ne
contribuent pas à la construction d'un Cameroun prospère et uni dans sa
diversité, un Cameroun exemplaire que nous souhaitons de tous nos voeux ».
Fin de citation .
Un penseur pour sa part signale des résistances à la loi dans le domaine d{;s
sciences sociales7
, et décrit la situation de la manière suivante:
« la règlementation a couvert l'ensemble des secteurs, quitte à améliorer ou à
redresser certains aspects en cours d'évolution dans la diachronie. Depuis la
o
Constitution et ses textes explicatifs et applicatifs, la panoplie des textes et
règlements existe et encadre l'activité. Les textes existent donc pour réguler
l'activité. Comme on peut le constater avec les soubresauts qui ont bouleversé
l'équilibre national, il est évident que l'application des textes a fait défaut. »
6 Discours prononcé à la veille de la 55e édition de la fête de la jeunesse célébrée le jeudi 11 Février 2021,
Cameroon Tribune n° 12284 du vendredi 12 Février 2021.
7 Professeur Abbé Jean Marie BODO in « Le multiculturalisme camerounais et sa praxis quotidienne », Editions
« Connaissances et savoirs», Décembre 2020, PP. 143 et 144.

Fin de citation.
Cette pensée renvoie à l'urgence de se ressaisir ou de corriger les erreurs du
passé, dans la perspective de redécouvrir les valeurs oubliées, ou qui tombent
en désuétude, de rétablir les équilibres rompus, et de mettre en oeuvre tout
moyen susceptible d'éradiquer les menaces qui pèsent sur la cohésion et la
paix sociales.
Appliquée au phénomène criminel, elle révèle le rejet de la loi par des individ!:Js
qui adoptent des écarts de comportements. Elle convoque une action
corrective de leur attitude.
Confronté aux mutations des procédés utilisés par les hors-la-loi, et
· l'émergence de formes nouvelles de délinquance, le législateur pénal
camerounais adapte ponctuellement la législation aux circonstances.
L'appareil judiciaire pour sa part, est appelé à revisiter les penchants asociaux
et pour apporter sa contribution à leur éradication, à rajuster ses décisions en
conséquence.
Le tableau délinquant se dessine clairement à nos yeux.
Le déploiement des formes renforcées d'indiscipline par des individus au· x
intentions douteuses favorise l'adoption des postures qui fragilisent le sens
patriotique, contribue à multiplier les attitudes de rejet, lesquelles se
traduisent par la négation des valeurs qui naguère constituaient la norme de · référence de la vie communautaire.
Des infractions que l'on ne connaissait qu'à l'état résiduel se répandent avec
une fréquence inacceptable.
D'une manière ou d'une autre, la conséquence immédiate de cette nouvelle
donne est l'exacerbation des atteintes aux personnes et aux biens, l'érection en
culte de l'outrage aux institutions, le reflux du respect des règles éthiques
régissant les rapports individuels et le commerce social.
Prenant sa source sur un tel terreau, le phénomène criminel évolue et
s'amplifie continuellement.

Alors que le crime organisé, le trafic illicite de drogue et le terrorisme ont
constitué les problèmes majeurs de ces deux dernières décennies, de nouvelles
activités criminogènes surgissent au premier plan et viennent aggraver les
vecteurs existants.
Il ne se passe plus de temps sans que l'on ne déplore des dérives d'un type
nouveau. Des postures asociales sont adoptées au grand jour par une frange de
la population, à travers lesquelles les actes criminels s'enracinent en se
sophistiquant de plus en plus.
La déliquescence des valeurs morales et éthiques caractérise le décor planté
par ces formes nouvelles d'expression de la déviance.
Celles-ci varient en fonction du degré de violence, de la nature des auteurs ou
des victimes, et des types spécifiques de délinquance.
L'on assiste à la montée de la petite et de la grande délinquances.
La petite délinquance est caractéristique des voleurs à la tire ou des
pickpockets, lesquels deviennent de plus en plus ingénieux à écumer les
marchés, les lieux publics ou de forte concentration.
La recrudescence de la grande délinquance s'accompagne pour sa part de
brutalité et de violence. Le grand banditisme introduit des techniques
nouvelles et des formes particulières de vols à main armée avec utilisation des
armes de guerre, des braquages de voitures, des assassinats de tout genre, des
enlèvements avec demande de rançon, des crimes crapuleux accompagnés de
viols ou de sévices corporels, mais aussi des crimes rituels.
Selon la nature des auteurs ou des victimes, l'on voit s'accentuer la
participation des jeunes enfants dans la perpétration des actes délictueux, la
commission des atteintes au droit de la famille par des conjoints, la
multiplication des violations du droit de l'environnement, l'aggravation des
atteintes à l'économie et des menaces aggravées à la sécurité des personnes et
des biens.
La pression de la délinquance juvénile, celle qui est perpétrée par des jeunes,
et notamment des adolescents, devient de plus en plus forte, avec cette

nouveauté que l'âge d'une large frange de ces jeunes malfaiteurs tourne
désormais autour de 10 à 15 ans.
Les jeunes délinquants participent à la perpétration de toutes les formes
d'exactions, de la petite criminalité aux actes les plus crapuleux. Leur présence
dans les milieux criminogènes affecte la vie de famille, impacte Je
fonctionnement des établissements d'enseignement, et ce, au préjudice des
géniteurs, des apprenants, mais aussi de leurs encadreurs.
La législation nationale a dû en tenir compte.
En effet, avant la loi n° 2005/7 du 27 Juillet 2005 portant Code de Procédure
Pénale, le mineur de 10 à 14 ans, certes pénalement responsable, ne pouvait
faire l'objet que de l'une des mesures spéciales prévues par la loi.
Il s'agit principalement de la mesure de l'éducation en milieu ouvert, de la
liberté surveillée, de la mesure de garde ou du placement dans un
établissement spécialisé.
<
Si dans le cadre de la protection de l'enfance, le législateur a maintenu
l'interdiction de recourir à l'emprisonnement des mineurs de quatorze ans, des
mesures de sauvegarde de l'ordre social plus coercitives ont dû être envisagées
à l'encontre de ceux d'entre eux qui seraient âgés de plus de douze ans ~t
commettraient les crimes les plus graves.
En son article 704, la loi susvisée admet que le mineur de douze à quatorze ans
peut faire l'objet d'un mandat de détention provisoire en cas d'assassinat, de
meurtre ou de coups mortels.
La gravité objective et l'horreur des actes reprochés à ces délinquants
contraignent les pouvoirs publics de recourir aux enquêtes préliminaires, ainsi
qu'à l'ouverture de procédures devant les juges d'instruction et de jugement,
dans la perspective de rassembler et organiser les conditions de leur
amendement et de leur resocialisation.
Au sein des familles, une évolution négative se dessine dans les rapporJs
conjugaux. En dehors des violences physiques faites aux femmes que certaines
traditions avaient cru banaliser en leur temps, et des destructions de biens, de
nouvelles dérives voient le jour à la faveur des mutations sociales.


Les violences psychologiques ou morales, en particulier les humiliations, les
abandons de domicile, les répudiations se multiplient. Ces dérapages côtoient
des violences spécifiques comme les harcèlements sexuels et les viols.
L'accentuation d'un libertinage incontrôlé du langage et des moeurs alimente
des débordements verbaux, à l'instar des injures, alors par ailleurs que se
précise le spectre des violences économiques liées au changement du mode de
contribution à la vie de la cellule familiale par les conjoints.
Si le projet du code de la famille reste encore en gestation, il est cependant
utile de souligner que l'éradication de ces dérives fait partie des grandes
préoccupations qui sont à l'origine du projet, l'objectif à atteindre restant entre
autres, l'assainissement des moeurs et une meilleure cohésion de la cellule
familiale.
Les violences sont néanmoins proscrites et réprimées, la condamnation à des
peines, et même à des peines d'emprisonnement, est de plus en pl~s
prononcée à l'encontre de leurs auteurs.
La prostitution semble également prendre un essor avec les déplacements vers
les grandes agglomérations de populations en proie à l'insécurité. A ce. s
déplacés internes viennent s'ajouter les migrants en provenance de pays
voisins, réfugiés au Cameroun pour des raisons diverses.
La précarité des conditions de vie dans un milieu parfois hostile est un facteur
important de développement de la prostitution.
A certains endroits, l'on a assisté à l'apparition de nouvelles formes de ce
délit.
Traditionnellement comprise comme le fait de livrer son corps aux plaisirs
sexuels d'autrui moyennant paiement en argent ou en services divers, elle
impliquait jusqu'à une époque récente, des jeunes filles mères et sans travail,
des femmes abandonnées ou divorcées.
A présent, de nouvelles formes apparaissent au grand jour.
La prostitution fait de plus en plus le lit des étudiantes des universités et
grandes écoles ainsi que des jeunes filles des lycées et collèges.

Mais, elle touche aussi la gente masculine au sein de laquelle le phénomène
des prostitués homosexuels s'introduit de plus en plus.
La pédophilie qui était jadis rare, se développe avec la promiscuité qui sévit
dans un habitat souvent inapproprié. Elle est de plus en plus dénoncée devant
nombre de juridictions, les victimes se recrutant parmi les enfants de la rue et
les enfants de parents pauvres.
Ces problèmes sociaux sont accentués avec la vulgarisation des résultats de
certaines découvertes scientifiques.
Si la science contribue de manière indubitable au progrès de l'humanité, et à
l'amélioration des conditions de vie des populations, il reste à en juguler les
facettes criminogènes, lesquelles sont de nature à secréter des troubles à
l'ordre public au même titre que les autres vecteurs de la déviance.
La science informatique constitue une illustration patente de cette situation.
L'irruption de cette science et de ses dérivés dans la vie quotidienne de
nombreux Camerounais a donné naissance à une criminalité aux conséquences
redoutables.
La criminalité informatique ou cybercriminalité est l'une des formes de
délinquance qui connaît ces derniers temps la montée la plus forte au
Cameroun. En même temps qu'il se banalise, l'outil internet devient un moyen
par excellence de commission des infractions.
De plus en plus de malfaiteurs exploitent la rapidité, la fonctionnalité des
techniques modernes de l'informatique, ainsi que l'anonymat dont elles sort
revêtues pour commettre des exactions au préjudice des tiers.
Les auteurs de cette forme de délinquance rivalisent d'ingéniosité pour
escroquer leurs victimes, lorsqu'ils ne se servent pas de l'outil internet pour
dévoyer les moeurs par la diffusion de programmes inappropriés, pour
dénaturer le moyen démocratique de la liberté d'expression à travers des abus
de langages, des calomnies et diffamations ou en diffusant des affirmations
propres à discréditer des hommes et des institutions.
Cette forme émergente d'actes illégaux est une menace dont le monde entier
et le Cameroun en particulier doivent davantage tenir compte. Des crimes qui

hier étaient impossibles au regard des circonstances, sont devenus une réalité
avec le développement de la cybernétique.
L'anonymat qu'offre internet et la possibilité d'adopter des identités flexibles
facilitent l'accomplissement des actes répréhensibles à des degrés divers. Les
malfaiteurs accèdent à un nombre important de cibles à travers les services en
ligne tels les services bancaires, les achats en ligne et les réseaux sociaux.
La monétique y a à son tour transporté ses travers.
Grâce à la connectivité mondiale, les criminels apprennent de nouveaux modes
opératoires sans avoir besoin d'en rencontrer les initiateurs. Les réseaux
sociaux fournissent des formes insoupçonnées de sensibilisation criminelle et
créent des liens entre des groupes criminels.
La fraude à l'appel téléphonique vient compléter ce tableau suffisamment
sombre et fait prospérer des trafics d'influence, des chantages et des
escroqueries les uns plus importants que les autres.
Les particularités criminogènes de la science cybernétique ont provoqué un
bouleversement de l'ordre pénal classique dont les réponses traditionnelles,
conçues et élaborées pour un environnement limité dans l'espace, se sont vite
révélées inappropriées et inadaptées pour saisir les subtilités réelles d~s
innovations introduites par l'ère numérique.
Le législateur camerounais a dû adopter une loi spécifique pour sanctionner les
infractions consécutives aux applications informatiques.
Il s'agit de la loi n° 2010/012 du 21 Décembre 2010 relative à la cyber sécurité
et à la cyber criminalité au Cameroun.
MESDAMES, MESSIEURS,
La République du Cameroun porte une attention particulière à la protection de
l'environnement.

Dans son préambule, la loi n° 96/06 du 18 Janvier 1996 portant révision de la
Constitution du 02 Juin 1972 dispose que
«toute personne a droit à un environnement sain. La protection de
l'environnement est un devoir pour tous. L'Etat veille à la défense et à la
promotion de l'environnement. »
La loi n° 96/12 du 05 Août 1996 portant loi-cadre relative à la gestion de
l'environnement a repris cette préoccupation à son compte et dispose, en son
article 2 que
«L'environnement constitue en République du Cameroun un patrimoine
commun de la nation. /1 est une partie intégrante du patrimoine universel. »
A l'échelle internationale, le pays a ratifié plusieurs Conventions sur la
question et notamment:
La Convention internationale de Paris du 19 Mars 19028 sur la protection
des oiseaux utiles à l'agriculture;
La Convention adoptée à Alger le 15 Septembre 19689 dans le cadre de
la conservation et l'utilisation des ressources en sol, en flore et en faune,
qui fait obligation aux parties contractantes d'adopter une législation
appropriée sur la chasse;
Le Cameroun est également membre de la Conférence des Nations Unies
sur l'environnement et le développement tenue à Rio de Janeiro du 03
au 14 Juin 1992.
Par respect des engagements résultant de ces divers instruments, le législate.u r
punit de la peine capitale celui qui porte atteinte à l'environnement avec une
intention terroriste.
Sur un plan général, l'existence de sanctions adéquates est un moyen de
dissuasion important, et notamment pour les infractions à caractère
transfrontalier.
8 Cette convention a reçu son effet en France par Décret du 12 Décembre 1905 (J.O. du 19 Décembre 1905 . •
9 La convention d'Alger est entrée en vigueur le 16 Juin 1969 ; elle a été révisée et enregistrée à MAPUTO au
Mozambique.

Si pendant longtemps, le principe n'était pas considéré comme une urgence,
aujourd'hui, la lutte contre les atteintes à l'environnement est résolument
devenue globale.
Dans les zones de recasement ou d'immigration, l'environnement est d'autant
plus en péril que l'approvisionnement en bois de chauffe et en denrées
alimentaires se fait régulièrement au détriment des espèces protégées. La
destruction des plantes rares et des animaux en voie de disparition a souvent
été le recours ultime des migrants dans leur quête de survie.
Le braconnage est pratiqué par des individus dangereux qui parfois
appartiennent à des bandes armées alors par ailleurs que l'exploitation
forestière connaît des excès réprimés par la loi.
Une enquête réalisée avant le Symposium sur le renforcement des cadres
juridiques pour lutter contre la criminalité liée aux espèces sauvages en Afriqoe
centrale et occidentale tenu à ABIDJAN en Côte d'Ivoire les 11 et 12 Septembre
2018, a révélé que les pays de ces deux Sous Régions appliquent des peines
d'emprisonnement minimales moyennes de deux mois et des peines
maximales moyennes de cinq ans.
La tenue de ce Symposium a montré qu'il existe entre ces pays, une volonté
manifeste de coordonner les actions engagées, d'améliorer la coopération
judiciaire et la reconnaissance mutuelle des décisions de justice entre les Etats.
Cette volonté de coopération s'est également imposée avec la recrudescence
de la criminalité économique et financière.
Outre les actions judiciaires organisées pour lutter contre les diverses atteintes
portées aux biens des particuliers et des organismes privés, les pouvoirs publics
doivent constamment rester en éveil pour garantir la pérennité de la fortune
publique.
L'urbanisation rapide enregistrée ces dernières années draine vers les centres
urbains des populations de plus en plus nombreuses. La surpopulation des
agglomérations urbaines au détriment des campagnes développe le chômage.

Dans un environnement économique plombé par la récession mondiale, les
facteurs de délinquance se démultiplient.
Divers problèmes sociaux viennent s'ajouter à cet environnement de
déséquilibre économique pour constituer le terreau d'une criminalité
économique à facettes multiples dans laquelle se classent les atteintes à 'la
fortune publique.
Dans le souci de préserver la fortune publique de la prédation qui prend de
plus en plus de l'ampleur, les pouvoirs publics camerounais arriment -la
politique criminelle à la situation réelle. A cet effet, ils ont initié des procédures
spécifiques de répression de la faute pénale que l'homme de la rue a
dénommées « Opération Epervier )}.
Cette opération vise à traquer les auteurs des atteintes importantes aux biens
publics pour leur appliquer la sanction rapide et dissuasive appropriée.
Pour mener cette opération à bien, les pouvoirs publics ont créé aux côtés des
juridictions existantes un organe juridictionnel dénommé Tribunal Criminel
Spécial.
Cette juridiction est chargée d'instruire et de juger les cas les plus graves
d'atteinte aux biens publics. Elle a pour but de renforcer le dispositif de lutte
contre les atteintes à la fortune publique, lequel se compose, non seulement
de l'action répressive, mais aussi et surtout, de la fonction comptable.
Les ordonnateurs et les comptables publics occupent une place prépondérante
dans la préservation de la fortune publique.
Les efforts déployés par les pouvoirs publics dans ce sens visent alors à appuyer
l'action des organes chargés de la lutte contre la criminalité financière, et
notamment les juridictions répressives qui voient leur action revigorée avec la
création du Tribunal Criminel Spécial, mais aussi la revitalisation de la Chambre
des Comptes de la Cour Suprême et des organes étatiques tels le Contrôle
Supérieur de l'Etat, le Conseil de Discipline Budgétaire et Financière, les
Cellules de Lutte contre la Corruption des Ministères et la mise en place des
organes indépendants à l'instar de la Commission Nationale de Lutte contre la
Corruption (CONAC) et l'Agence Nationale d'Investigation Financière (AN IF).

Pour atteindre l'objectif d'assainissement recherché, encore faut-il que
l'environnement institutionnel et social reste harmonieux, et débarrassé des
menaces à la paix et à la sécurité. Partout dans le monde, des mesures sont
prises pour épargner les peuples de la terreur à laquelle certains groupes
recourent à des fins diverses.
La sous Région Afrique Centrale est régulièrement l'objet de troubles qui
naissent des affrontements liés à des tentatives de conquête du pouvoir que
certains groupes mènent dans leurs pays.
A la proximité de ces pays qui partagent des frontières communes, s'ajoute ·Ia
libre circulation des personnes et des biens dans l'espace CEMAC, ce qui
favorise l'intensification du trafic de drogues et des armes, la traite des
personnes, le trafic illégal des migrants, la piraterie maritime dans le Golfe de
Guinée, le braconnage entre autres.
Les écarts de conduite spécifiquement liés aux situations de troubles et les
infractions s'y rattachant font l'objet d'un suivi permanent.
.
Les juridictions nationales interviennent chaque fois qu'il est nécessaire et
appliquent sans discontinuer les peines prévues par la législation en vigueur.
Les pouvoirs publics ont mis à leur disposition les instruments nécessaires à cet
effet. \1 s'agit de la législation interne et de divers Traités signés par le pays.
Ainsi, au plan interne, la loi n° 2014/028 du 23 Décembre 2014 portant
répression des actes de terrorisme est venu répondre à des situations de
troubles caractérisés dans la Sous Région, mais aussi à l'intrusion du groupe
terroriste BOKO HARAM dans l'espace sécuritaire national, la perpétration dès
agressions et des violences diverses dans les Régions du Nord-Ouest et du SudOuest,
et les conséquences négatives, particulièrement dans la Région de l'Est,
du gonflement incontrôlé des effectifs de migrants sur le territoire national.
Pour faire face de la manière la plus appropriée possible à cette situation
nouvelle, marquée par des atteintes répétées à l'intégrité physique des
personnes et aux biens publics et privés, la loi susvisée dispose en son article 2 :

« 1/ Est puni de la peine de mort celui qui, à titre personnel, en complicité ou
en coaction, commet tout acte ou menace susceptible de causer la mort, de
mettre en danger l'intégrité physique, d'occasionner des dommages corporels
ou matériels, des dommages aux ressources naturelles, à l'environnement ou
au patrimoine culturel dans l'intention:
1.a/ d'intimider la population, de provoquer une situation de terreur ou de
contraindre la victime, le gouvernement et/ou une organisation internationale
à accomplir ou à s'abstenir d'accomplir un acte quelconque, à adopter ou à
renoncer à une position particulière ou à agir selon certains principes;
1.b/ de perturber le fonctionnement normal des services publics, la prestation
de services essentiels aux populations ou de créer une situation de crise au sein
des populations;
1.c/ de créer une insurrection générale dans le pays;
En son alinéa 2, le même texte punit aussi de la peine de mort celui qui, pour
atteindre les mêmes objectifs que ceux précisés ci-dessus, est coupable de
l'une quelconque des infractions ci-après:
La fourniture ou l'utilisation des armes et matériels de guerre;
La fourniture ou l'utilisation des micro-organismes ou tous autres agents
biologiques, notamment des virus, des bactéries, des champignons GU
des toxi nes ;
La fourniture ou l'utilisation des agents chimiques, psychologiques,
radioactifs ou hypnotisants ;
La prise d'otage.
La peine est l'emprisonnement à vie lorsque les conséquences prévisibles des
différents actes susvisés sont la maladie des animaux ou la destruction des
plantes, toutes ces infractions étant caractérisées même en cas de guerre
officiellement déclarée.
Le même texte sanctionne de la peine de mort le financement des actes de
terrorisme par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, _le
financement se définissant comme étant l'action de fournir et/ou de réunir des
fonds ou encore d'offrir des services financiers.

L'infraction est caractérisée même si les fonds, moyens matériels et/ou servic~s
financiers n'ont plus été utilisés pour sa réalisation.
Elle est constituée même si les biens sont collectés et les services offerts sur le
territoire d'un autre Etat.
En son article 4, la même loi punit le blanchiment du produit des actes de
terrorisme et en son article S, le recrutement et la formation des personnes en
vue de leur participation aux actes de terrorisme.
L'article 6 quant à lui consacre la responsabilité pénale de la personne morale
auteur de l'infraction de terrorisme et la sanctionne d'une amende dont le
montant minimum est de cinquante millions (50.000.000) de francs CFA.
A l'instar de la loi n° 67/LF/l du 12 Juin 1967 portant institution du Code Pénal,
l'apologie des actes de terrorisme, la déclaration mensongère et la
dénonciation calomnieuse sont aussi réprimées par cette loi, laquelle, en
conformité avec les conventions internationales, assure par ailleurs .la
protection des témoins en punissant de l'emprisonnement à vie, celui qui
outrage ou menace un témoin même implicitement de violences, de voies de
fait ou de mort.
MESDAMES ET MESSIEURS,
Le déploiement de ce dispositif dissuasif de lutte contre la criminalité
émergente, ne fait cependant pas obstacle aux principes de l'Etat de droit et
la sauvegarde des droits de l'homme.
Il pose en filigrane le problème de l'efficacité ou de l'effet dissuasif de la peine.
Face aux contempteurs de la loi n° 2014/028 du 23 Décembre 2014 dont
certaines dispositions viennent d'être rappelées, le Professeur MOUANGUE
KOBILA , dans une interview publiée par le quotidien National Cameroôn
Tribune10 rappelait à son égard:
10 Cameroon Tribune n° 10734 du 09 Décembre 2014

« La loi anti-terrorisme n'est pas carte blanche au gouvernement pour réprimer
le terrorisme comme bon lui semble, tant il est vrai que le combat légitime et
primordial contre le terrorisme ne justifie pas tous les moyens .... La loi antiterrorisme
soumet la lutte anti-terroriste à un cadre juridique contraignant.
L'Etat reste soumis aux exigences de légalité. L'accès au juge est aussi garanti.
La proportionnalité, c'est-à-dire la pertinence des mesures de prévention et de
répression du terrorisme prises par l'Etat par rapport au risque sera évaluée
par les juridictions nationales et par les mécanismes nationaux, régionaux ou
universels .... »
Fin de citation.
A leur tour, pour leur déclaration, les Chefs d'Etat des Etats membres du
Conseil de Paix et de Sécurité de l'Afrique Centrale (COPAX) réunis le lundi i6
Février 2015 dans le cadre de la lutte contre le groupe terroriste BOKO HARAM
avaient dû se référer aux « différentes Résolutions des Nations Unies sur le
terrorisme et l'extrémisme violent, notamment la Résolution 2178 du 2.4
Septembre 2014 adoptée lors de la réunion du Conseil de Sécurité des Nations
Unies consacrée aux menaces contre la paix et la sécurité internationales
résultant d'actes de terrorisme» et « les Résolutions 2195 du 19 Décembre
2014 et 2199 du 12 Février 2015 du même Conseil de Sécurité des Natio(1s
Unies consacrées respectivement au terrorisme et à la criminalité
transnationale organisée et à la condamnation de toute forme de financement
du terrorisme ».
Monsieur Antonio GUTERRES, le Secrétaire Général des Nations Uniesl1
, définit
l'Etat de droit comme étant
« un principe de gouvernance en vertu duquel l'ensemble des individus, des
institutions et des entités publiques et privées, y compris l'Etat lui-même, ont à
répondre de l'observation de lois promulguées publiquement, appliquées de
façon identique pour tous et administrées de manière indépendante, et
compatibles avec les règles et normes internationales en matière de droits de
l'homme. »
11 Rapport sur l'Etat de droit et l'administration de la justice pendant une période de transit ion, rapport n° ,
5/2004/616

Le Cameroun est la fille des Nations Unies. Après les indépendances, le pays a
ratifié toutes les principales Conventions internationales relatives aux droits çle
l'homme.
S'appuyant sur les dispositions idoines de ces instruments, le législateur
national prend en compte tous les intérêts en présence. Il a mis en place un
dispositif qui concilie le devoir de protection de l'ordre public et la préservation
de la dignité et des autres droits de la personne humaine.
Ainsi, en matière de protection de la liberté d'aller et venir, les mesures
privatives de liberté sont rigoureusement organisées par la loi.
Celle-ci adosse la problématique de leur régularité et de leur opportunité aux
exigences de sauvegarde des droits de l'homme, en restreignant le recours à
ces mesures à la recherche de la réparation du tort commis à la communauté,
et à l'amendement et la resocialisation du condamné.
Lorsque la mesure de l'emprisonnement est prononcée, les pouvoirs publics
assurent au condamné le minimum de soins utiles à sa condition.
Néanmoins, dans certaines maisons d'arrêt, la surpopulation carcérale et les
charges inhérentes à l'exécution de la peine d'emprisonnement peuvent
rendre les conditions de la détention difficiles.
Pour limiter les désagréments subséquents, des mesures de désengorgement
des établissements pénitentiaires sont régulièrement prises par les pouvoirs
publics, en même temps qu'usant de son droit de grâce, le Chef de l'Etat décide
conjoncturellement des remises et des annulations de peine.
Le législateur pour sa part a contribué à atténuer la promiscuité subséquente à
la surpopulation, en repensant la peine et ses effets sur le phénomène criminel.
A l'article 18-1 de la loi n° 2 016/007 du 12 Juillet 2016 portant Code Pénal" il
édicte des peines alternatives, à savoir des peines qui peuvent être prononcées
à titre principal à la place de l'emprisonnement.
La notion de peines alternatives, autant pour ce qui est de sa variante travail
d'intérêt général que de celle de sanction-réparation, gravite autour de l'idee
de remplacement.

Le travail d'intérêt général peut être compris comme une privation partielle de
liberté. Il peut être décidé à la place de l'emprisonnement mais aussi de
l'amende. Cette peine est exécutée en faveur, soit d'une personne morale de
droit public, soit d'une personne morale de droit privé chargé d'une mission de
service public, soit encore d'un organisme habilité à mettre en oeuvre des
travaux d'intérêt général.
La sanction-réparation pour sa part, est le socle de la justice réparatrice. Elle a
fait son apparition dans les théories générales de la peine, dans la perspective
de préférer la médiation au prononcé d'une peine. Elle consiste en l'obligation
pour le condamné de procéder à la réparation matérielle du préjudice subi par
la victime, dans le délai et selon les modalités fixées par la juridiction
compétente.
Elle pourrait donc consister en le paiement de sommes d'argent, dont -le
montant serait fixé par la juridiction répressive avec l'accord de la victime et du
prévenu, lesquelles sommes devraient correspondre au montant des
dommages-intérêts qu'appelle le préjudice subi par la victime de l'infraction. La
sanction-réparation comprendrait donc une double dimension, le paiement dès
dommages-intérêts et la réparation en nature.
L'arrêt des poursuites est une autre institution participant du souci du
législateur camerounais de trouver des solutions alternatives à la peine
d'emprisonnement dans les cas où celle-ci risque de devenir contreproductive.
Elle a été instituée devant le Tribunal Criminel Spécial.
L'article 18 (nouveau) de la loi n02012/017 du 16 Juillet 2012 modifiant et
complétant certaines dispositions de la loi n° 2011/028 du 14 Décembre 2011
portant création d'un Tribunal Criminel Spécial dispose à cet effet qu'en cas de
restitution du corps du délit, le Procureur Général près le Tribunal peut, sur
autorisation écrite du Ministre en charge de la Justice, arrêter les poursuites
engagées avant la saisine de la juridiction de jugement.
Lorsque la restitution intervient après la saisine de la juridiction de jugement,
les poursuites peuvent être arrêtées avant toute décision au fond. La juridiction

saisie prononce toutefois les déchéances prévues à l'article 30 du Code Pénal
avec mention au casier judiciaire.
L'arrêt des poursuites ne constitue donc pas une excuse absolutoire, mais un
système palliatif à but d'intérêt général, la restitution du corps du délit étant de
nature à restaurer les équilibres rompus au préjudice de la société.
Il ne s'agit pas non plus d'un pardon accordé à l'auteur de l'infraction puisqu'i l
est condamné aux déchéances prévues par la loi, et notamment,
la destitution et l'exclusion de toutes fonctions, emplois ou offices publics;
l'incapacité d'être juré, assesseur, expert, juré-expert;
l'interdiction d'être tuteur, curateur, subrogé tuteur ou conseil judiciaire, si ce
n'est de ses propres enfants, ou membre d'un conseil de famille;
l'interdiction de porter toute décoration;
l'interdiction de servir dans les forces armées;
l'interdiction de tenir une école ou même d'enseigner dans un établissemeht
d'instruction et, d'une façon générale, d'occuper des fonctions se rapportant à
l'éducation ou à la garde des enfants.
Ces interdictions peuvent être perpétuelles ou à temps, la jurid iction
compétente étant appelée à en fixer les modalités d'application.
Au total, en dépit des effets aggravants des infractions émergentes sUr
l'environnement criminel, et l'émotion que leur commission suscite au sein de
l'opinion publique, le régime de la répression reste dominé par le respect de
l'Etat de droit et la sauvegarde des droits de l'homme.
Leur irruption sur la scène nationale et leur impact sur le respect de l'ordre et
la tranquillité publics en font néanmoins un grand sujet de préoccupation et
suscitent l'attention des autorités publiques à tous les niveaux.
Monsieur le Premier Président de la Cour Suprême,

C'est au bénéfice de ces quelques considérations que j'ai l'honneur de requérir
qu'il vous plaise de bien vouloir,
Déclarer l'année judiciaire 2020 close;
Déclarer l'année judiciaire 2021 ouverte;
Me donner acte de mes réquisitions;
Dire que du tout, il sera dressé procès verbal pour être classé au rang des
minutes du Greffe de la Cour Suprême.
LE PROCUREUR GENERAL
Luc NDJODO

  • +237 222 23 06 77

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